Un rapport pointe l’urgence de revoir la gouvernance et d’améliorer la performance des filières à Responsabilité élargie des producteurs (REP)

2 septembre 2024

[Communiqué de presse] Paris, le 2 septembre 2024

Le rapport conjoint très attendu de l’IGF, du CGE et de l’IGEDD, publié en juillet 2024, met en évidence les problèmes majeurs de performance des acteurs en charge de la gestion des REP et recommande la mise en place d’une autorité indépendante pour le pilotage et la régulation de ces dispositifs. Dans un contexte où la France est très en retard sur ses objectifs de recyclage et où les contraintes règlementaires européennes s’affirment, ELIPSO appelle l’attention du futur gouvernement sur l’urgence de la mise en œuvre des recommandations de ce rapport.

1. Un problème général de performance des REP

Le rapport de 2024, comme celui de la Cour des comptes en 2022 (Rapport de la Cour des comptes de septembre 2022 « PRÉVENTION, COLLECTE ET TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS :
UNE AMBITION À CONCRÉTISER » : https://www.ccomptes.fr/fr/publications/prevention-collecte-et-traitement-des-dechets-menagers), met en évidence un problème général de performance des REP :
• 40 % du gisement de déchets soumis à une REP qui échappe encore à la collecte et 50 % n’est
pas recyclé ;
la filière des emballages ménagers, qui représente 32 % du gisement enregistre un retard
important sur le recyclage des emballages en plastique et en aluminium. La Cour des comptes
soulignait alors que « le rattrapage du retard pris par la France dans le recyclage des
emballages est largement conditionné par la qualité de la collecte séparée des emballages en
plastique qui reste très inférieure aux moyennes européennes » ;
l’atteinte des objectifs des cahiers des charges impliquerait une multiplication par cinq des
tonnages collectés, par trois des tonnages recyclés et par neuf des tonnages réemployés.

2. La défaillance des pouvoirs publics en matière de pilotage des REP
Le rapport estime que le pilotage des filières par les pouvoirs publics présente des défaillances
latentes, principalement en raison de trois séries de facteurs :

• Les données sont trop anciennes, lacunaires et non fiables

Le rapport estime que le système d’information développé par l’ADEME ne constitue pas
actuellement un outil fiable de supervision des REP du fait :

d’un problème de disponibilité des données, avec un délai de deux années de retard ;
d’un défaut de disponibilité des données à l’égard du public ;
d’un manque significatif de fiabilité des informations recueillies qui reposent sur les simples
déclarations des metteurs en marché et des opérateurs aval.

Il précise notamment que les données relatives au gisement et à la dimension économique et
financière des filières sont manquantes et/ou non fiables.

Le rapport propose donc la mise en place d’un système d’informations fiabilisé par des audits
réguliers sur la qualité et la sincérité des données transmises.

• Les sanctions ne sont jamais mobilisées à l’égard des éco-organismes (EO) manquant à
leurs objectifs ou à l’égard des metteurs en marché fraudeurs.
• Il n’existe aucune régulation des équilibres concurrentiels

Sur ce point, le rapport souligne que les éco-organismes, en particulier ceux qui se trouvent en
position de quasi-monopole, disposent de plusieurs instruments d’influence sur les trois marchés
pertinents des REP (marché de l’adhésion, marché de la collecte sélective et du tri, marché de la
revente des matériaux ainsi que le marché du conseil). Cette situation aboutit à un fort pouvoir de
structuration de ces marchés.

En particulier, l’intervention des EO opérationnels comme vendeur sur le marché de la vente des
matériaux engendre un triple risque :

concurrence déloyale, vis-à-vis des opérateurs industriels en raison des informations
stratégiques dont ils disposent sur les opérateurs du fait de leur mission d’intérêt général ;
risque de transformation de segments du marché de la vente de matériaux engendrant une
augmentation des prix au détriment des acheteurs et des consommateurs ;
moindre incitation à l’innovation.

Le rapport met également l’accent sur les risques concurrentiels résultant du pouvoir d’influence
des EO du fait de leur mission d’intérêt général, en ce qui concerne les services de conseil hors
agrément qu’ils proposent. Il relève que ces services peuvent engendrer les risques concurrentiels
lorsqu’ils s’appuient sur les avantages que les EO tirent de leur mission d’intérêt général et/ou d’une
position dominante (ressources financières historiques, absence de comptabilité analytique séparée,
accès privilégié à l’information).
De même, il souligne les en raison du développement des risques accrus d’atteinte à la concurrence
situations ou un même EO est agréé pour plusieurs filières, ce qui renforce leur influence et donc leur pouvoir de structuration des marchés.

3. La nécessité de créer une autorité indépendante de régulation

3.1. Les nouveaux pouvoirs et les compétences

Compte tenu des éléments qui précèdent, le rapport recommande la création d’une instance
indépendante de pilotage et de régulation des REP qui disposerait de plusieurs compétences :

• Un pouvoir d’injonction de mise en conformité, complété d’un pouvoir de sanction ;

• Une compétence quasi-juridictionnelle de règlement des différends entre les acteurs : si
une telle compétence était instituée, le régulateur pourrait se prononcer dans des délais très
courts (ainsi que c’est le cas dans le secteur de l’énergie, des communications électroniques
ou des transports terrestres et ferroviaires), de 2 à 4 mois ;
Le recueil et la mise à disposition des données nécessaires à la production d’études sur les
filières et au pilotage de leur performance : cette compétence d’accès à l’information, le cas
échéant adossé à son pouvoir de sanction, le régulateur pourrait permettre de fiabiliser la
qualité des données collectées, ainsi que c’est le cas dans les autres secteurs régulés ;

• Le suivi de la concurrence sur les marchés des REP : ainsi qu’il existe dans d’autres secteurs
régulés, une procédure de coopération entre le régulateur des REP et l’Autorité de la
concurrence pourrait être mise en place ;
• La délivrance des agréments des éco-organismes et des systèmes individuels avec le
pouvoir de retrait des agréments.
Parmi les propositions, le rapport recommande à l’instance de régulation de mieux inciter les
collectivités à la performance, notamment par une différenciation des niveaux de soutien aux
collectivités, selon les coûts moyens de collecte et de traitement des déchets et en publiant les
niveaux de performance de chaque collectivité, sur les principaux flux de matières.

3.2. Les ressources de la future autorité
Le rapport cible un besoin autour de 20 millions d’euros par an pour financer la nouvelle autorité de
régulation, avec un transfert d’ETP :
Un transfert des ressources humaines et financières de la DSREP de l’ADEME (36 ETP et 2m€
/an)
Un transfert de la redevance payée par les EO (6,1 m€ / an)
Un financement complémentaire annuel par le budget de l’État (11,9 millions d’euros /an).
En contrepartie, le transfert de plusieurs missions à l’autorité indépendante de régulation conduirait
à la disparition de la CIFREP et des censeurs d’Etat, des comités des parties prenantes qui
deviendraient facultatifs. Les EO coordonnateurs ne se verraient plus confiés la définition des règles
d’équilibrage.

En conséquence, ELIPSO appelle l’attention du prochain gouvernement sur la nécessité de ne pas
laisser en déshérence les conclusions de ce rapport de 2024 qui, à l’instar des rapports de la Cour
des Comptes de 2016, 2020 et 20221, mettent en évidence des inefficacités majeures dans
l’organisation de la politique de gestion des déchets en France.
Il convient de rappeler que la contribution liée aux emballages plastiques non recyclés augmente
depuis 2021 et fait de la France le premier contributeur. Le retard sur la performance du recyclage
des plastiques pèse sur la contribution française au budget de l’UE. La part française de la
contribution au titre de la ressource plastique atteindrait 21 % en 2024 contre 17 % en 2021 soit
1,6 milliard d’euros en 2023, ce qui conduit la France à être le premier contributeur
Il est temps de cesser de s’absorber dans les constats présents qui tombent dans l’abîme et nous
font dépendre de l'avenir.

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